Présentation de Desperado

L’épervier passait très haut dans le ciel. Il avait survolé des forêts, des vallons, des falaises, la mer; encore des falaises, des vallons. Des forêts. Enfin, il cessa de battre des ailes et, se laissant porter par un léger vent d’altitude, il plana en cercles de plus en plus étroits. Il s’approchait du sol. Son œil rond, intense et noir observait les bois de sapins, au-dessous de lui, et la clairière, ceinte de très haut murs. Bientôt, il fut assez près pour que les taches de couleur - rouges, bleues, jaunes- qui dessinaient d’élégantes arabesques dans cette clairière se transforment en autant de parterres de fleurs. Ce monde était magnifique. Une allée de gravier bleu pâle y serpentait. L’épervier se posa au sommet du mur d’enceinte et continua d’observer. Sous la frondaison des arbres centenaires qui ombraient l’autre extrémité du jardin, un homme vêtu d’une ample cape avec un capuchon et qui semblait paisible ramassait des fleurs ici et là, regardant le paysage d’un air distrait, comme perdu, ailleurs.

Vous vous en doutez sûrement, cet homme n’était nul autre que Desperado, ayant discrètement passé outre la sécurité de Kryas, feignant « une mission de la plus haute importance aux motifs secrets». Bien sûr, cette mission n’était que foutaises, il n’avait envie que d’observer le monde dans lequel les elfes vivaient de plus près, pour changer un peu de la laideur déprimante du royaume des démons, son futur royaume (dont il allait d‘ailleurs vite changer le look). Il n’avait même pas pénétré a l’intérieur du royaume que déjà un « représentant » de la loi -Un gaillard aux larges épaules et a la carrure imposante qui n'avait pas vraiment des traits d'elfes- venait a sa rencontre, il mit rapidement son capuchon et un masque noir simple avant que le garde le voit, il devait sûrement être recherché en ces terres, comme partout ailleurs.

-Hé, vous là-bas!

Desperado continua son chemin, la tête baissée. Il se dirigeait vers un pont, quand le garde se ficha devant lui.

-Vous apparaissez masqué, monsieur. Qu’avez-vous à cacher?

-Masqué, je suis comme la vérité. La vérité ne se cache que pour mieux apparaître.

-Alors apparaissez, répliqua le garde. Enlevez ce capuchon et ce masque.

-La vérité dont je parle n’est pas sous mon masque.

Le garde commençait à être exaspéré par la politesse et la douceur par laquelle le jeune homme lui répondait en essayant d'embrouiller son esprit.

-Et, sous votre masque, quelle est la vérité?

-Monsieur, avant d’enlever mon masque, soulevez donc le vôtre. Derrière vôtre visage sans expression, que dissimulez-vous?

Le garde blêmit. Ses lèvres se serrèrent, ses yeux étincelèrent de rage et de chagrin, un souvenir sembla lui venir.

-Qui vous permet de me parler de la sorte !?

-Moi-même et le fait que je me contrefous de toute autorité de votre part.

Piqué au vif, le garde sortit un fusil et tira sur Desperado, réaction attendue. Desperado ne fit que se tasser sur le côté -la balle perça sa cape- et lança un poignard qui fit mouche en se plantant dans le crâne du représentant de la loi, qui s’effondra dans la rivière. Son cadavre fût emporté par le courant.

-Pauvre homme... Il devait avoir un passé chargé de mauvais souvenirs... Ha ha ha, j’ai presque pitié... En fait, même pas! Pathétique ha ha ha ha!

Le juge manipulateur enleva son masque et sa capuche et alla s’accoter sur le bord du pont, sans l'ombre d'un remord.